Pérégrinations inutiles

 

Je me baladais. Je vous assure que c’est vrai. Sans objectif, ce qui avait un côté aussi agréable que déroutant. Vous êtes dubitatifs ? Ne peut-on avoir pour seul objectif que vivre dans le présent ? Et bien… pour quelques philosophes, et ceci depuis l’antiquité grecque et sans doute au-délà, le présent n’existe pas. A peine est-il appréhendé qu’il a déjà disparu. Or, s’il a disparu, c’est peut-être qu’il a vraiment existé, finalement, non ? Moi, je me baladais. Tranquillement, croyez-le ! Vous n’y arrivez pas ? Peut-être pensez-vous que j’allais à un rendez-vous galant, peut-être imaginez-vous que j’allais à un entretien d’embauche. Non, je me baladais, c’est tout. Les griffes du réalisme avaient depuis longtemps desserré leur prise sur moi et plus personne ne m’en voulait. On avait juste un peu peur de moi, parfois feuille tremblante lorsqu’en manque ou en surdose de café. On ne me fuyait pas, on m’esquivait, à la mode aïkidoka, sans vraiment s’en apercevoir, sans vraiment comprendre ma peine larvée, cachée dans un soubassement inconscient de ma psyché pour n’avoir pas à surgir et ajouter de la douleur d’exister à la douleur d’avoir été et à la souffrance de devoir devenir. Et moi, je me baladais, si si. J’ai beau le répéter, j’ai l’impression que ça ne rentre pas.

Pourquoi est-ce que je me baladais ? Pourquoi n’étais-je pas en train de me battre pour faire ce que la commune doxa accepte comme médicament de l’âme : s’en sortir ? Combien de peut-être faudra-t-il à cette gentille balade d’autrefois pour canaliser l’ambivalence de mes opinions à moi ? Peut-être une petite dizaine, peut-être une bonne centaine, probablement une infinité…

En m’enfonçant dans l’obscurité des possible, ceux en cours de création, ceux en cours d’acceptation, je me disais que je trouverais bien une voie, un tao, une complétude inattendue, que mon ajna chakra, mon troisième oeil, se réveillât à nouveau. En me baladant, j’observais, je guettais, je me faisais un tour d’horizon de la présence inamovible des fantômes du temps, ce temps dont je me repaissais des couloirs, un peu sur le mode visiteur, comme dans un film dont tout le monde aurait parlé, et reparlé, et encore parlé, devenu oeuvre du commun pour que ces pauvres êtres humains puissent avoir une base pour communiquer, ce qui grammaticalement s’avère logique. Et maintenant, vous me voyez mieux. You will know my name (Arch Enemy). Vous avez peut-être compris que j’étais inconsommable, peut-être pas. Seulement, je me balade à nouveau, laissant mourir, comme un souvenir caduque – ou tout simplement périmé -, les images d’un passé impossible à retracer sans faire la jurisprudence de mes égarements. Hop ! Deux tercian, un valium.

Je me balade, encore aujourd’hui, à la recherche d’un Graal. Car désormais j’ai un objectif. D’ailleurs, j’ai un peu de mal à en saisir les contours. Je suis en quête mais cette quête est en cours d’élaboration, en cours d’élucidation, en chemin de s’inventer. Et c’est pour ça que je me balade, sans but défini de façon prémédité. Je cherche une fin à ce rêve pour retomber dans la réalité. Celle-ci s’est escamotée, comprenez bien ! Alors j’en laisse le souvenir à la cave, oiseau de proie qu’il me faut surveiller. Peut-être qu’il faudra un nombre fantasmatique de peut-être et peut-être que cela ne résoudra rien… Alors je me balade… Trois petits points et puis c’est tout…

Vous aussi, vous vous baladez ? Pour quoi faire ? Peut-être (encore un peut-être) pour recharger les batteries après votre journée, dure pour beaucoup d’entre vous, de tripalium à demi volontaire. Ne me dîtes rien, venez dans ma tête, elle est pleine de mauvais forfaits ourdis dans la souffrance d’avoir cru tout comprendre. Je ne serai pas le premier à le dire mais il est devenu apparant que le savoir donne le vertige et que ce vertige fait grandir mon ignorance : plus je sais, moins je comprends. A fortiori, je finirai ainsi par ne plus rien comprendre du tout. Alors je me baladerai, encore et encore. La sensation de ne servir à rien ni à personne s’estompe un peu désormais. Je ne me balade plus, je cours. Prenez ceci en notes que je cherche des réponses à des questions que ma psychose a laissé s’inscrire dans mon agenda des choses à élucider. Et il y a une pleine décharge de pensées paranoïdes à élucider.

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